Commentaires de l’avocate de Sergueï Pougatchev sur l’arrêt de la Cour d’Appel du 8 février 2018
Le 8 février 2018 la Neuvième Cour d’appel de commerce a rejeté l’appel de l’ex-sénateur Sergueï Pougatchev, portant sur la décision du Tribunal de Commerce de Moscou du 26 octobre 2017. Par ladite décision le Tribunal avait rejeté un recours en révision (introduit sur le fondement de circonstances nouvelles) du jugement reconnaissant Sergueï Pougatchev responsable à titre subsidiaire à hauteur de 75,6 milliards de roubles.
Ni Sergueï Pougatchev ni ses représentants n’étaient présents à l’audience, n’ayant pas été informés de l’examen du recours par le tribunal de première instance. Ils étaient donc privés de la possibilité de faire valoir leurs arguments, ce qui a été l’un des fondements de l’appel.
Lors de l’audience du 8 février de la Neuvième Cour d’appel de commerce les intérêts de Sergueï Pougatchev étaient représentés par Maître Anna Stavitskaïa.
“Nous avions des arguments juridiques solides pour demander l’annulation du jugement de première instance, affirme Anna Stavitskaïa. Conformément au Code de Procédure Commerciale, une décision du Tribunal de Commerce doit être annulée dans le cas où l’une des parties n’aurait pas été dûment informée de la date de l’audience.”
La requête argumente que Sergueï Pougatchev n’aurait pas été dûment informé de la date de l’audience, parce qu’il est citoyen d’un état étranger ce qui prévoit une procédure de notification particulière. Cette procédure n’aurait pas été respectée en l’espèce. La procédure prévue pour les citoyens de la Fédération de Russie n’avait d’ailleurs pas été respectée non plus. “Les éléments de l’affaire ne contiennent aucune indication d’une notification adressée à Sergueï Pougatchev, note Me Stavitskaïa. Lors de l’audience de première instance, même l’administrateur judiciaire s’est prononcé contre l’examen de l’affaire en l’absence d’éléments pouvant confirmer que Sergueï Pougatchev avait été informé. Mais le tribunal de première instance et la Cour d’Appel ont trouvé cela tout à fait normal.”
“Il était évident que la Cour n’était nullement intéressée à entendre les arguments des parties, et que la décision avait été prise avant que la cour ne se réunisse en audience. L’objectif du juge était d’en finir au plus vite, constate Anna Stavitskaïa. Ce simulacre, qui n’a pas duré plus de dix minutes, pouvait difficilement être qualifié d’audience, dit-elle. Dès la première minute il est apparu avec évidence que la cour n’attachait aucune importance aux éléments de l’affaire. Pour le juge tout était déjà clair. Il n’écoutait pas les arguments des parties. Il a d’ailleurs dit d’emblée qu’il n’avait pas besoin d’entendre les parties, dans la mesure où, selon lui, les documents contenaient toutes les informations nécessaires.”
Le juge Anton Maslov de la Neuvième Cour d’appel de commerce a rejeté la demande d’ajournement formulée par l’avocate. Anna Stavitskaïa n’avait reçu le pouvoir de représenter les intérêts de Sergueï Pougatchev qu’à la veille de l’audience. Elle aurait dû pouvoir prendre connaissance des éléments du dossier en prévision de l’audience, mais le juge a estimé qu’elle “avait eu suffisamment de temps pour se préparer”.
Par ailleurs, Anna Stavitskaïa avait transmis au tribunal par l’intermédiaire du greffe un mémoire d’appel, conformément aux dispositions du Code de Procédure Commerciale de la Fédération de Russie. “Ce type de mémoire explicatif est habituellement accepté par le tribunal, dit Anna Stavitskaïa. Mais dans mon cas le magistrat m’a rendu le mémoire, en disant que pour lui tout était très clair et qu’il n’avait pas besoin d’explications complémentaires.”
Anna Stavitskaïa souligne en outre qu’au cours de l’audience le juge Maslov a empêché non seulement l’avocate de Sergueï Pougatchev de présenter ses conclusions, mais aussi les créanciers de Mejprombank. Ces derniers estiment que le statut de citoyen russe ou étranger de Sergueï Pugatchev est d’une importance capitale pour l’exécution du jugement du Tribunal de Commerce. Pour déterminer ce statut une révision de la décision de première instance est nécessaire. Mais lorsque la représentante des créanciers a essayé de faire valoir son avis, le juge l’a exclue de la salle d’audience, estimant qu’elle entravait l’instruction. Or ladite personne ne cherchait qu’à expliquer sa position au Tribunal.
La décision de la Neuvième Cour d’appel de commerce du 8 février fera l’objet d’un recours, a assuré Anna Stavitskaïa.